
Comprendre un trouble neurobiologique complexe
et souvent méconnu
Le Trouble avec DĂ©ficit de l’Attention avec ou sans HyperactivitĂ© (TDAH) touche environ 5% de la population infantile, soit un Ă deux enfants par classe. Pourtant, malgrĂ© sa prĂ©valence et sa description mĂ©dicale depuis le XVIIIe siĂšcle, ce trouble reste largement incompris, sous-diagnostiquĂ© en France,
et fait l’objet de nombreuses controverses.
Par Dr Kozam Tahora
Réseau Organics-Ortho |
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LE TDAH : BIEN AU-DELĂ DE LA SIMPLE « HYPERACTIVITĂ »
Une erreur historique dans la terminologie.
Le terme « hyperactivité » constitue une erreur mĂ©dicale historique. En focalisant l’attention sur l’agitation physique – le symptĂŽme le plus visible – on a longtemps nĂ©gligĂ© le cĆur vĂ©ritable du problĂšme : le trouble de l’attention.
Cette confusion terminologique explique pourquoi, il y a 30 Ă 40 ans, on parlait encore « d’instabilitĂ© psychomotrice ».
Cette erreur a eu des consĂ©quences importantes : elle a conduit au sous-diagnostic des formes non hyperactives, particuliĂšrement frĂ©quentes chez les filles, et a renforcĂ© l’idĂ©e fausse que seuls les enfants « turbulents » pouvaient ĂȘtre concernĂ©s.
1. TDA sans hyperactivité : l'enfant "dans la lune"
Ces enfants sont physiquement calmes, voire trop sages. Ils ne dérangent personne. Le professeur écrit sur le bulletin : « dans la lune », « dans les nuages », « ne suit pas en classe », « distrait ». Ils sont présents physiquement mais absents mentalement, perdus dans leurs pensées multiples et désorganisées.
Le danger ? Ces enfants passent inaperçus. Comme ils ne causent pas de problÚmes disciplinaires, le diagnostic arrive souvent tardivement, parfois au collÚge ou au lycée, quand leurs capacités intellectuelles ne suffisent plus à compenser le trouble.
2. TDA avec hyperactivité : le "tourbillon"
Ces enfants cumulent trois groupes de symptĂŽmes :
⹠Inattention : incapacité à se concentrer durablement
⹠Hyperactivité : agitation motrice constante, impossibilité de rester assis
⹠Impulsivité : paroles spontanées sans filtre, interruptions fréquentes, décisions hùtives
Ce profil est diagnostiquĂ© plus prĂ©cocement car l’enfant « dĂ©range ». Les enseignants se plaignent, les parents consultent. Paradoxalement, ĂȘtre gĂȘnant accĂ©lĂšre l’accĂšs aux soins.
LES MĂCANISMES NEUROBIOLOGIQUES DU TDAH
Le cerveau attentionnel : un systĂšme complexe
Pour comprendre le TDAH, il faut saisir un principe fondamental : se concentrer, ce n’est pas seulement activer l’attention,
c’est aussi inhiber toutes les distractions.
Lorsqu’une personne neurotypique dĂ©cide de lire un livre, son cerveau effectue deux opĂ©rations simultanĂ©es :
1. Activation : focalisation sur le texte
2. Inhibition : neutralisation des bruits extérieurs, des pensées parasites, des stimuli visuels périphériques.
Chez la personne TDAH, le systĂšme d’inhibition est dĂ©faillant. RĂ©sultat : une exposition permanente aux « distracteurs ».
Deux types de distracteurs
– Distracteurs externes : tout ce qui se passe dans l’environnement
âą En classe : le crayon qui tombe, le nouveau pantalon du camarade, le bruit dans le couloir
âą Au bureau : les conversations des collĂšgues, les notifications, les mouvements
– Distracteurs internes : le flux des pensĂ©es
⹠« 10 idĂ©es en mĂȘme temps » selon les mots d’un jeune patient
⹠Impossibilité de hiérarchiser ces pensées
⹠Chaque idée en chasse une autre dans un carrousel mental épuisant
Un enfant de 10 ans, aprĂšs traitement, a dĂ©crit ce phĂ©nomĂšne avec une clartĂ© remarquable : « Avant le mĂ©dicament, j’avais toujours 10 idĂ©es en mĂȘme temps. Depuis que j’ai le mĂ©dicament, j’ai toujours des idĂ©es en mĂȘme temps mais je peux donner la prĂ©fĂ©rence Ă l’une d’entre elles et mettre les 9 autres au placard. »
La piste dopaminergique
Les recherches actuelles pointent vers un déficit en dopamine, neurotransmetteur essentiel à la communication neuronale.
La dopamine joue un rĂŽle crucial dans :
âą La motivation
âą La concentration
⹠Le contrÎle exécutif
âą La rĂ©gulation de l’attention
Ce déficit expliquerait pourquoi les médicaments dopaminergiques (qui augmentent le taux de dopamine disponible) sont si efficaces pour « délivrer » les patients de leurs symptÎmes.
LES CAUSES ET FACTEURS DE RISQUE : GĂNĂTIQUE ET DĂVELOPPEMENT
La génétique : un risque multiplié par 5
Le TDAH prĂ©sente une composante hĂ©rĂ©ditaire forte. Dans la population gĂ©nĂ©rale, le taux est de 5%. Chez les apparentĂ©s du premier degrĂ© (parents, frĂšres, sĆurs, enfants) d’une personne TDAH, ce taux grimpe Ă 25%.
Ce facteur gĂ©nĂ©tique explique un phĂ©nomĂšne clinique frĂ©quent : le diagnostic intergĂ©nĂ©rationnel. Un parent accompagne son enfant en consultation et dĂ©couvre, au fil des questions du psychiatre, qu’il prĂ©sente lui-mĂȘme tous les symptĂŽmes du TDAH adulte non diagnostiquĂ©.
Les facteurs périnataux
Les complications autour de la naissance augmentent le risque :
⹠Prématurité
âą Petit poids de naissance
âą Hypoxie nĂ©onatale (manque d’oxygĂšne Ă la naissance)
⹠Complications obstétricales
Important : ces facteurs augmentent le risque mais ne garantissent ni la prĂ©sence ni l’absence de TDAH. De nombreux enfants nĂ©s dans des conditions difficiles n’ont pas de TDAH, et inversement.
Ce que le TDAH n’est PAS
Contrairement aux croyances populaires :
â Les Ă©crans et rĂ©seaux sociaux ne causent pas le TDAH
â Ce n’est pas un « trouble moderne » (dĂ©crit depuis le XVIIIe siĂšcle)
â Ce n’est pas un manque d’Ă©ducation
â Ce n’est pas un problĂšme affectif ou familial
â Ce n’est pas un manque de volontĂ©
Si la France a l’impression que le TDAH est rĂ©cent, c’est uniquement parce que le pays Ă©tait en retard dans la reconnaissance de ce trouble, bien identifiĂ© depuis des dĂ©cennies dans d’autres pays.
LE TDAH AU QUOTIDIEN : MANIFESTATIONS CONCRĂTES
Chez l’enfant
Le profil sans hyperactivité :
âą Semble Ă©couter en classe mais n’entend rien
⹠Oublie les consignes immédiatement aprÚs les avoir entendues
⹠Perd réguliÚrement ses affaires
âą Commence plusieurs devoirs sans en finir aucun
⹠Résultats scolaires en « dents de scie » : brillant sur un exercice, catastrophique sur le suivant
⹠Bulletin type : « élÚve capable mais ne travaille pas », « dans la lune », « manque de concentration »
Le profil avec hyperactivité :
âą Se lĂšve constamment en classe
⹠Bavarde de façon incessante
âą Joue avec ses crayons, ses vĂȘtements, tout ce qui tombe sous la main
⹠Interrompt systématiquement
⹠Pose des questions sans écouter les réponses
âą Bulletin type : « perturbe la classe », « n’Ă©coute pas les consignes », « agitation permanente »
Le cas de l’enfant brillant : un diagnostic retardĂ©
Un phĂ©nomĂšne critique : l’enfant Ă haut potentiel intellectuel avec TDAH.
Ses capacitĂ©s cognitives exceptionnelles compensent le trouble pendant des annĂ©es. Il obtient de bonnes, voire d’excellentes notes jusqu’en primaire, parfois jusqu’au collĂšge. Puis, soudainement, l’effondrement : le volume de travail augmente, la complexitĂ© s’accroĂźt, les capacitĂ©s de compensation atteignent leurs limites.
RĂ©trospectivement, en relisant les anciens bulletins, les signes Ă©taient lĂ : « pourrait mieux faire », « bavarde », « distrait », « travail bĂąclé ». Mais comme les notes restaient correctes, personne ne s’est inquiĂ©tĂ©.
Chez l’adulte : un handicap invisible
L’adulte TDAH non diagnostiquĂ© vit souvent un enfer quotidien :
Au travail :
⹠Procrastination massive : reporter indéfiniment les tùches fastidieuses
âą Travail au dernier moment, dans l’urgence absolue (seule condition qui force la concentration)
âą 4 heures pour accomplir une tĂąche d’une heure
âą Oublis de rendez-vous, confusion dans les dates
⹠Difficultés avec les rapports écrits, les tùches administratives
âą Sensation d’Ă©puisement permanent
âą Impression frustrante de ne jamais ĂȘtre Ă la hauteur de son potentiel
Dans la vie quotidienne :
⹠Désorganisation chronique
âą Perte constante d’objets (clĂ©s, tĂ©lĂ©phone, papiers)
⹠Difficultés avec les tùches ménagÚres séquentielles (lessive : laver, étendre, sécher, plier, ranger = 5 étapes = épuisement)
⹠Multiplication des listes « pour ne rien oublier »
âą Relations sociales compliquĂ©es par l’impulsivitĂ© verbale (« gaffes » frĂ©quentes)
Manifestations physiques discrĂštes :
Contrairement Ă l’enfant qui se lĂšve et court partout, l’adulte TDAH prĂ©sente une agitation subtile :
âą Changements incessants de position assise
⹠Jambe qui croise et décroise continuellement
âą Tapotements nerveux
⹠Difficulté à tenir 3 heures dans une réunion
Certains adultes dĂ©veloppent des stratĂ©gies compensatoires remarquables : carnets ultra-dĂ©taillĂ©s, alarmes multiples, systĂšmes d’organisation sophistiquĂ©s. Ils contrĂŽlent ainsi leur TDAH, mais au prix d’une vigilance permanente Ă©puisante.
LE DIAGNOSTIC : UN DĂFI SANS TEST BIOLOGIQUE
L’absence de marqueur objectif
Contrairement au COVID oĂč un test PCR confirme le diagnostic clinique, il n’existe aucun test sanguin, scanner ou IRM pour diagnostiquer le TDAH. C’est un diagnostic purement clinique, basĂ© sur :
1. L’interrogatoire dĂ©taillĂ© du patient et de sa famille
2. Les bulletins scolaires (recherche de patterns récurrents)
3. Les questionnaires standardisés pour parents et enseignants
4. L’observation directe en consultation
5. L’anamnĂšse dĂ©veloppementale (histoire de la petite enfance)
Cette absence de biomarqueur crĂ©e une marge d’incertitude qui exige expertise et expĂ©rience clinique.
Le piÚge de la « faute »
La difficulté majeure : les symptÎmes ressemblent à des comportements volontaires.
âą L’inattention ressemble Ă de la paresse
âą L’oubli ressemble Ă de la nĂ©gligence
âą L’agitation ressemble Ă de l’indiscipline
âą L’impulsivitĂ© ressemble Ă de l’impolitesse
Bulletin scolaire typique : « Ne fait pas d’efforts », « Ne respecte pas les consignes », « Bavarde », « Pourrait mieux faire siâŠÂ »
C’est l’Ă©quivalent de dire Ă un enfant myope au fond de la classe : « Tu devrais faire un effort pour lire le tableau ». Injustice absolue : on reproche Ă l’enfant un symptĂŽme qu’il ne contrĂŽle pas.
Quand les symptĂŽmes deviennent un trouble
Tout le monde a parfois des moments d’inattention ou d’agitation. La question clĂ© : Ă quel moment cela devient-il pathologique ?
CritĂšre principal : manifestation quasi permanente avec retentissement significatif sur :
⹠La réussite scolaire
âą La vie professionnelle
âą Les relations sociales
âą L’estime de soi
⹠La qualité de vie globale
Important : Ce n’est pas le TDAH en soi qu’on doit traiter, mais les consĂ©quences du TDAH. Un TDAH sans consĂ©quences nĂ©gatives ne nĂ©cessite pas de traitement mĂ©dical.
LES TRAITEMENTS : EFFICACITĂ ET CONTROVERSES
Le traitement médicamenteux : données factuelles
Le médicament le plus utilisé est un psychostimulant dopaminergique (augmente la dopamine disponible). Trois arguments majeurs le soutiennent :
1. Recul historique exceptionnel
⹠Découvert en Suisse en 1945
âą Prescrit depuis plus de 60 ans dans de nombreux pays
âą La France ne le prescrit que depuis 1996 (25 ans de retard)
2. Volume d’utilisation massif
⹠Prescrit dans environ 80 pays développés
âą Dizaines de millions d’enfants traitĂ©s
âą Millions d’adultes Ă©galement
⹠Si effets graves, ils auraient été détectés
3. Réversibilité immédiate
âą Effet observable en quelques jours
⹠Possibilité de « juger sur piÚce » rapidement
âą ArrĂȘt simple si inefficace ou mal tolĂ©rĂ©
Efficacité démontrée :
Souvent spectaculaire. Des témoignages rapportent :
âą Enfant qui passe de 8/20 de moyenne Ă 16/20 en un trimestre
âą Adulte qui dĂ©couvre ce qu’est « se concentrer naturellement »
⹠Disparition de la sensation de « brouillard mental »
âą Impression d’ĂȘtre « dĂ©livré » du trouble
Un point crucial : le mĂ©dicament ne rend pas plus intelligent, il libĂšre l’intelligence entravĂ©e par le trouble attentionnel.
Les autres approches thérapeutiques
D’autres options existent :
⹠Psychomotricité : travail sur la régulation corporelle
⹠Psychologie/psychothérapie : gestion du stress, estime de soi
⹠Neurofeedback : entraßnement des ondes cérébrales
âą Techniques de relaxation
ProblĂšme : efficacitĂ© significativement moindre comparĂ© au traitement mĂ©dicamenteux, selon les donnĂ©es disponibles. Ces approches peuvent ĂȘtre utiles en complĂ©ment, mais rarement suffisantes seules pour les TDAH moyens Ă sĂ©vĂšres.
Les controverses françaises : un débat idéologique
La France se distingue par une résistance importante au diagnostic et au traitement du TDAH. Pourquoi ?
Division psychiatrique française :
âą Courant psychanalytique (traditionnellement dominant en France) : considĂšre tous les troubles comme d’origine affective, Ă©ducative, relationnelle. Pour cette approche, le TDAH n’existe pas vraiment ou est secondaire Ă des problĂšmes familiaux.
⹠Courant neurobiologique (majoritaire dans le monde) : considÚre le TDAH comme un trouble cérébral authentique nécessitant un traitement biologique.
Cette controverse est idĂ©ologique, pas scientifique. Les centaines d’Ă©tudes internationales convergent vers la rĂ©alitĂ© neurobiologique du TDAH, mais une partie de la psychiatrie française reste rĂ©ticente.
Conséquences tragiques :
âą Retard diagnostic (parfois 10-15 ans)
âą AnnĂ©es d’errance, de culpabilisation
⹠Recherche de « fautes éducatives » inexistantes
⹠Parcours scolaire et professionnel gùché
⹠Estime de soi détruite
LE "SUPER-POUVOIR" DU TDAH : MYTHE ET RĂALITĂ
Les aspects positifs : existent-ils vraiment ?Certains discours prĂ©sentent le TDAH comme un « atout » avec des « super-pouvoirs » : crĂ©ativitĂ©, Ă©nergie, spontanĂ©itĂ©. Qu’en est-il vraiment ?
RĂ©ponse nuancĂ©e : Il existe effectivement quelques aspects qui peuvent ĂȘtre perçus positivement :
⹠Spontanéité et jovialité chez certains TDAH
⹠Créativité (parfois, mais pas systématiquement)
âą Ănergie dans l’urgence : capacitĂ© Ă mobiliser des ressources exceptionnelles au dernier moment
⹠Pensée divergente : aptitude à faire des liens originaux
MAIS : ces « avantages » sont minoritaires et largement surpassés par les difficultés. La balance penche trÚs nettement du cÎté négatif.
La passion : le véritable « remÚde miracle »
Observation clinique majeure : Lorsqu’une personne TDAH exerce une activitĂ© qui la passionne intensĂ©ment, les symptĂŽmes disparaissent comme par magie.
âą L’enfant TDAH incapable de se concentrer 10 minutes sur un devoir peut passer 4 heures sur un jeu vidĂ©o sans bouger
âą L’adulte dĂ©sorganisĂ© et distrait devient ultra-focalisĂ© dans son domaine de passion
âą La crĂ©ativitĂ© s’exprime pleinement quand le sujet captive
Le problĂšme :
âą L’Ă©cole n’est pas « passionnante 6 heures par jour »
⹠Tous les métiers ne sont pas passionnants 35 heures par semaine
âą On ne peut pas construire une vie uniquement sur ses passions
D’oĂč la nĂ©cessitĂ© d’une prise en charge pour les situations « non passionnantes » du quotidien.
L’urgence comme stimulant
PhĂ©nomĂšne classique : la procrastination extrĂȘme.
L’Ă©tudiant TDAH ne rĂ©vise pas pendant 3 mois malgrĂ© ses bonnes intentions. Puis, 3 jours avant l’examen, panique et mobilisation totale : 12 heures de travail par jour, concentration remarquable.
Pourquoi ? L’urgence crĂ©e un stress qui stimule la production de neurotransmetteurs (notamment adrĂ©naline), compensant partiellement le dĂ©ficit dopaminergique.
Mais cette stratĂ©gie est Ă©puisante, anxiogĂšne, et inefficace Ă long terme. Ce n’est pas un super-pouvoir, c’est une stratĂ©gie de survie.
VIVRE AVEC UN TDAH : PERSPECTIVES ET ESPOIR
Le diagnostic : un soulagement
Pour beaucoup d’adultes, le diagnostic est libĂ©rateur :
âą Fin de la culpabilitĂ© (« Ce n’est pas ma faute »)
⹠Explication des échecs passés
⹠Compréhension des difficultés relationnelles
⹠Possibilité de se reconnecter avec son potentiel réel
TĂ©moignage frĂ©quent : « Toute ma vie, j’ai cru que je n’Ă©tais pas intelligent, que je n’Ă©tais pas fait pour les Ă©tudes. En fait, j’Ă©tais brillant mais handicapĂ© par le TDAH. »
Les stratĂ©gies d’adaptation
Avec ou sans traitement, des stratégies aident :
Organisation compensatoire :
⹠Carnets ultra-détaillés (noter TOUT)
âą Alarmes multiples
âą Routines strictes
⹠Environnement épuré (moins de distracteurs)
Choix de vie adaptés :
⹠Métiers permettant mouvement et variété
âą Ăviter les tĂąches ultra-rĂ©pĂ©titives
⹠Environnement de travail adapté (bureau isolé vs open space)
⹠Découpage des grandes tùches en micro-étapes
Soutien social :
⹠Entourage informé et compréhensif
⹠Partenaire qui comprend les oublis et la désorganisation
⹠Aménagements scolaires (tiers-temps aux examens, etc.)
Le traitement ne change pas la personnalité
Crainte frĂ©quente des patients : « Le mĂ©dicament va me changer, je ne serai plus moi-mĂȘme, je perdrai ma crĂ©ativitĂ©, mon Ă©nergie. »
RĂ©alitĂ© : Le traitement dĂ©livre des difficultĂ©s sans entraver les qualitĂ©s. Il agit comme des lunettes pour un myope : la vision devient nette, mais la personne reste la mĂȘme.
Témoignages post-traitement :
⹠« Je me sens enfin ĂȘtre moi-mĂȘme »
⹠« Je dĂ©couvre ce que c’est que de penser clairement »
⹠« Je suis toujours créatif, mais maintenant je peux finaliser mes projets »
PERSPECTIVES ET ENJEUX SOCIAUX
Un trouble sous-diagnostiqué en France
Comparé aux autres pays développés, la France accuse un retard considérable :
âą Sous-diagnostic massif, particuliĂšrement chez les filles et les adultes
âą Stigmatisation persistante
⹠Résistance culturelle au diagnostic neurobiologique
Les consĂ©quences de l’absence de diagnostic
Pour l’enfant :
âą Ăchec scolaire non justifiĂ©
âą Exclusions, punitions pour des symptĂŽmes
âą Construction d’une image de soi nĂ©gative
⹠Risque accru de décrochage scolaire
Pour l’adulte :
âą Sous-performance professionnelle chronique
âą Risque accru de chĂŽmage
⹠Difficultés relationnelles
âą Risques de dĂ©pression, d’anxiĂ©tĂ©, d’addictions (tentatives d’auto-mĂ©dication)
Le sexe-ratio : les filles oubliées
Les garçons sont diagnostiqués 3 à 5 fois plus que les filles. Pourquoi ?
⹠Les filles ont plus souvent des formes sans hyperactivité (moins visibles)
⹠Elles développent des stratégies compensatoires plus sophistiquées
âą Les attentes sociales diffĂ©rentes (on tolĂšre moins l’agitation chez les garçons)
âą Les filles intĂ©riorisent plus (anxiĂ©tĂ©, dĂ©pression) plutĂŽt qu’extĂ©rioriser (agitation)
Résultat : sous-diagnostic massif des filles, qui souffrent en silence.
Vers une meilleure reconnaissance
Des progrĂšs s’observent :
âą Augmentation des diagnostics en France (rattrapage du retard)
⹠Meilleure information des professionnels de santé
âą Reconnaissance progressive dans l’Ăducation Nationale
⹠Visibilité médiatique croissante
Mais le chemin reste long pour atteindre les standards internationaux de prise en charge.
CONCLUSION : UN TROUBLE RĂEL QUI MĂRITE RESPECT ET COMPRĂHENSION
Le TDAH n’est ni une mode, ni une excuse, ni une invention du marketing pharmaceutique. C’est un trouble neurobiologique authentique, dĂ©crit depuis des siĂšcles, affectant des millions de personnes dans le monde.
Points clés à retenir :
1. Le TDAH est biologique, pas éducatif ou affectif
2. Il existe avec ou sans hyperactivité, attention au sous-diagnostic des formes « calmes »
3. Les symptĂŽmes ne sont pas des fautes mais des manifestations d’un dysfonctionnement cĂ©rĂ©bral
4. Le diagnostic se fait cliniquement en l’absence de test biologique
5. Le traitement médicamenteux est le plus efficace selon les données disponibles
6. La passion est le meilleur « remÚde naturel », mais ne suffit pas au quotidien
7. Ce n’est pas un « super-pouvoir » : les difficultĂ©s dĂ©passent largement les avantages
8. Le diagnostic peut ĂȘtre libĂ©rateur, surtout pour les adultes ayant souffert toute leur vie sans explication
Le TDAH, quand il impacte significativement la vie quotidienne, mĂ©rite d’ĂȘtre reconnu, diagnostiquĂ© et traitĂ©. Avec une prise en charge adaptĂ©e, les personnes TDAH peuvent rĂ©vĂ©ler leur plein potentiel et vivre une vie Ă©panouie, dĂ©barrassĂ©e du poids constant de symptĂŽmes incompris et injustement reprochĂ©s.
L’enjeu pour la sociĂ©tĂ© : passer de la stigmatisation Ă la comprĂ©hension, du reproche au soutien, de l’ignorance Ă la connaissance. Chaque personne TDAH mĂ©rite cette reconnaissance et cette aide.